Nous sortons du car et nous dirigeons vers l'écurie. Je regarde autour de moi : des arbres à perte de vue, un chemin, et de l'autre côté un bâtiment en L avec une piscine arrondie. Pas un truc carré où les enfants doivent s'agiter jusqu'à épuisement, non, un riant bassin en forme de ventre mou où j'aperçois, nonchalamment étendues au soleil, deux des évadées de chez nous. Libres comme l'air. C'est là que je veux - que je devrais - être, en train de faire l'étoile de mer sur une serviette.
Les moniteurs nous rabattent vers les écuries. Celui qui me fera m'asseoir sur un animal hennissant, brayant ou blatérant n'est pas né. Je cède volontiers ma place aux impatients. Un petit groupe emprunte le chemin boisé au trot tandis que nous attendons notre tour. Le moniteur ridicule part en éclaireur sur un vieux cheval gris qui pète tout le temps.
Je me dirige vers la monitrice en bermuda beige, celle qui me prend le plus souvent en pitié.
"S'il te plaît, en attendant les autres, est-ce que je peux aller rendre visite à ma copine dans la colonie ? S'il te plaît !"
Elle jette un regard vers le bâtiment et me donne son accord.
"Pas plus de dix minutes hein !"
Je cours jusqu'à l'entrée. A l'intérieur, un adulte me demande qui je suis. J'explique que ma colonie m'envoie transmettre un message à ma copine et qu'il faut que je trouve sa chambre de toute urgence.Elle jette un regard vers le bâtiment et me donne son accord.
"Pas plus de dix minutes hein !"
"Va voir au premier étage, demande aux filles de te montrer où est sa chambre mais je crois qu'elle n'est pas là."
Zut. Je monte les escaliers quatre à quatre. Je tombe sur deux filles de mon âge qui me disent qu'elles partagent sa chambre et m'y accompagnent.
-"Elle n'est pas là mais elle va revenir. Tu peux l'attendre ici.
- Oh, vous avez des chambres de quatre lits ! Et vous avez le droit de rester dedans !"
Nous échangeons sur le fonctionnement de nos colonies et elles écoutent, effarées, la description de mes journées.
Ma copine arrive. Elle n'a pas l'air étonnée de me voir. En fait elle a une drôle de tête. Elle se dirige droit vers son lit et s'allonge.
- "Tu es malade ?
- Oui, depuis hier. Ils m'ont emmenée voir un médecin, là.
- Et ?
- J'ai fait une indigestion de paella.
- Toi alors ! Tu fais des indigestions de paella ! Ca risque pas de m'arriver !"
Je lui raconte le dortoir, le sport toute la journée, le ménage des chambres, le coup de sifflet du matin... Son visage se tord.
- "Arrête de me faire rire, j'ai mal au ventre !"
J'ai envie de rire avec elle et de pleurer aussi. Ses camarades de chambre sont gentilles ; tout, jusqu'à sa maladie, paraît paradisiaque.
Une monitrice entre et prend des nouvelles de ma copine. Elle se tourne ensuite vers moi et me demande d'où je viens, puis me précise d'une voix calme que je n'ai pas le droit d'être ici. Je suis renvoyée dans mes quartiers. Je prends congé à regret et reviens vers le troupeau de footeux qui attend son tour d'équitation. Je lis dans les yeux de miss bermuda que j'ai dépassé les dix minutes. Elle me propose un tour. Je refuse tout : fières juments, vieux cheval souffreteux, poneys énervés, carrioles... Plutôt mourir !
Nous reprenons le car en fin d'après-midi. Encore trois semaines à tirer. En regardant s'éloigner la résidence de ma copine et sa piscine ondulant, le front appuyé sur la vitre, je rêve d'une indigestion.
Zut. Je monte les escaliers quatre à quatre. Je tombe sur deux filles de mon âge qui me disent qu'elles partagent sa chambre et m'y accompagnent.
-"Elle n'est pas là mais elle va revenir. Tu peux l'attendre ici.
- Oh, vous avez des chambres de quatre lits ! Et vous avez le droit de rester dedans !"
Nous échangeons sur le fonctionnement de nos colonies et elles écoutent, effarées, la description de mes journées.
Ma copine arrive. Elle n'a pas l'air étonnée de me voir. En fait elle a une drôle de tête. Elle se dirige droit vers son lit et s'allonge.
- "Tu es malade ?
- Oui, depuis hier. Ils m'ont emmenée voir un médecin, là.
- Et ?
- J'ai fait une indigestion de paella.
- Toi alors ! Tu fais des indigestions de paella ! Ca risque pas de m'arriver !"
Je lui raconte le dortoir, le sport toute la journée, le ménage des chambres, le coup de sifflet du matin... Son visage se tord.
- "Arrête de me faire rire, j'ai mal au ventre !"
J'ai envie de rire avec elle et de pleurer aussi. Ses camarades de chambre sont gentilles ; tout, jusqu'à sa maladie, paraît paradisiaque.
Une monitrice entre et prend des nouvelles de ma copine. Elle se tourne ensuite vers moi et me demande d'où je viens, puis me précise d'une voix calme que je n'ai pas le droit d'être ici. Je suis renvoyée dans mes quartiers. Je prends congé à regret et reviens vers le troupeau de footeux qui attend son tour d'équitation. Je lis dans les yeux de miss bermuda que j'ai dépassé les dix minutes. Elle me propose un tour. Je refuse tout : fières juments, vieux cheval souffreteux, poneys énervés, carrioles... Plutôt mourir !
Nous reprenons le car en fin d'après-midi. Encore trois semaines à tirer. En regardant s'éloigner la résidence de ma copine et sa piscine ondulant, le front appuyé sur la vitre, je rêve d'une indigestion.