jeudi 1 mai 2008

Brecht sous les brèches

Lundi je me rendis sous la pluie à Firminy (à côté de Saint-Etienne), dans ce lieu classe et classé qu'est l'espace le Corbusier. Enfin quand je dis classe... Nous prîmes place et eau à la maison de la culture, monument laissé à l'abandon par une mairie peu sensible à la vocation sociale du célèbre architecte. Il faut préciser que l'espace théâtral se situe sous une toiture en mal d'entretien. Et voilà le travail : une scène habitée par quelques flaques, des acteurs entre la lumière et les gouttes, une mise en scène slalomant au coeur de cette fête à la grenouille inopinée. Devant telle crue nos yeux n'en crurent pas les leurs : des filets d'eau défilaient sans peur parmi câbles et projecteurs. Le spectacle fut introduit par le conservateur des lieux himself s'excusant platement de devoir sans doute bientôt nous évacuer pour cause de sécurité plus que flottante. Heureusement pour nous, il n'en fit rien. Brecht nous sortit la tête hors de l'eau et fit cesser l'averse. La compagnie de l'Abribus nous mit justement à l'abri du naufrage. Une mise en scène minimale, des costumes sombres à l'image de la période dépeinte, et , ce qui me plut par-dessus tout, l'idée géniale de faire appel à un choeur rythmant la pièce par des chants et des hors-champs et des bruitages de circonstance (le public pouffa forcément lorsqu'ils se mirent à imiter le son de la pluie, pouvant comparer in praesentia avec l'original). Nous regrettâmes toutefois un triptyque mal exécuté, d'un symbolisme douteux ("La bête immonde" l'était au même titre que la peinture censée la représenter), qui heureusement n'apparaît qu'à la dernière scène, et quelques faux pas d'acteurs parfois perturbés par la porosité des lieux. Mais nous ovationnâmes Maïa, dramatiquement crédible dans le monologue de la femme juive quittant son pays. La pièce nous laissa l'amer constat qu'il y a loin de la culture à la subvention et surtout que notre époque ressemble en bien des points aux tristes années trente. Rien que pour ça, "Grand peur et misères du IIIè Reich" continue de nous faire un bien fou.

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