Une fièvre impromptue est venue me veiller dimanche soir. Agenouillée à mon chevet et toute à mon hagarde horizontalité, elle m'enfonçait des piques à brochette dans le dos et les bras. Je passai donc un lundi loin du monde, embrochée et somnolente. De mon lit, j'entendais la plainte sourde des murs. D'immenses scies circulaires sifflaient et des coups de marteau résonnaient dans tout l'immeuble. Je profitais de sursauts d'énergie pour me torturer un peu plus : "Qu'est-ce que j'ai encore ?!". La journée passa entre le lit et la chaise. Et maintenant qu'il est 3 heures du matin, mon corps ne veut ni dormir, ni se lever. Le blog est moins capricieux et a ceci d'aimable qu'il ne dort jamais.
J'ai de la chance, la radio passe "Quand j'étais petit" de Charles Trenet. Quelques minutes de beauté pure, l'effet est immédiat. Le quartet me monte à la tête et son swing met mon coeur au diapason. Les mots simples de Trenet me transportent au dedans de moi. C'est la force de sa poésie. Il ne vous impose pas un univers, il vient jouer en chanson avec le vôtre. C'est par ce subterfuge qu'il arrive à vous faire croire aux facteurs qui s'envolent, aux fées qui changent les ânes en gendarmes et aux fantômes qui chantent. Il convoque et fait revivre l'enfant qui est en vous, votre âme et vos amours passées en se baladant sur les notes et les mots. Et vous, vous n'êtes plus pareil après l'écoute d'une de ses chansons. "Quand j'étais petit, je vous aimais, sans rien vous dire..." démarre-t-il, avec sa musicale diction. Il vous parle de la barbe de parrain et du nez du pharmacien et ça y est, vous avez dix ans. Quand la chanson se termine, vous renversez votre chaise et partez en trottinant.
Cette fois, mon corps réclame un matelas en me signifiant bien qu'il n'a pas l'intention de dormir. Je retourne faire l'étoile de mer sur mon pieu en attendant l'heure du médecin.
6 commentaires:
Personne ne dit rien ?
C'est un très beau texte. Ah ah ? Je ne suis plus seul à parler musique...et vie...et à emmêler les deux...
merci Dorham :)
C'est vrai dis-donc, j'ai tendance à suivre pas mal tes pas en ce moment !
C'est magnifiquement bien écrit.
Après je suis moins fan d'Aznavour, même malade...
Pfff ! Quelle chance que tu aies ouvert un blog !
Parfait, Mam'zelle !
(Mais il faudrait aussi penser à confisquer sa passoire à la bonne...)
Didier Goux : Merci encore (et dire que j'ignorais l'orthographe exacte de mon héros...) !
Quand à la bonne, je lui laisse son jouet, je ne tiens pas à me faire mordre !
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