mercredi 10 septembre 2008

Le temps d'une nuit

Le Bernin, L'extase de sainte Thérèse, 1652

A l'époque, il y a deux ans de ça, c'était bien. Nos lèvres s'étaient jointes et dès lors je ne voyais pas pourquoi nous aurions à cesser de nous embrasser. Boire, manger, parler avec les gens que j'aime, autant d'activités vitales que je me voyais abandonner à jamais pour cause de bouche en dérangement. Embrassée et embarrassée de savoir qu'il faudrait bien arrêter avant de mourir. Certes mais à ce moment-là, mourir, c'était très secondaire. Cela aurait pu arriver sans que je n'y prête attention.

Les cigales pouvaient bien redoubler leur raffut, les étoiles cligner et se mouvoir de côté, l'herbe sèche embaumer ma veste, mes sens n'étaient guère distraits par ce décor hors du quotidien. J'étais trop occupée à chercher par quelle contorsion ma peau aurait pu épouser entièrement la sienne.

Je ne sais pas combien de temps nous passâmes à profiter de la douceur d'être ensemble. En tout cas, j'étais persuadée que nous occuperions l'éternité de nos vies à continuer. Vous comprenez quoi, quand celui que vous désirez vous embrasse pour la première fois. Celui que j'admirais et avec qui j'aimais parler se révélait être un délicieux amant. Je vous fais un dessin ? Pardon, vous aviez compris.

J'étais amoureuse.

La suite est simple : il n'y en a pas. Il avait déjà quelqu'un.

L'apprendre après avoir goûté à l'illusion est un peu brutal. Mais comme on dit, y'a pas mort d'homme. On se relève, on réajuste son soutif, on époussète sa veste, et on s'en va d'un air digne. Je ne veux pas d'un demi-homme, moi. Je ne me contenterai pas des miettes laissées par l'officielle. Il l'a bien compris. Il s'est étonné que je ne sois pas dans la même situation. Il croyait que je trompais mon mari. Que pouvait bien faire une fille comme moi toute seule, etc. Sauf qu'une fille comme moi n'a d'yeux que pour son homme, sinon elle ne reste pas avec. Bref.

Vous voilà bien : Marie-Georges vous narre une historiette vieille comme Hérode. Non. Après quelques mois sans nouvelles, il est venu me voir plusieurs fois ces jours-ci. Sa disponibilité m'a intriguée mais je n'ai rien osé demander. J'ai retenu mes mains et ma bouche qui parfois avançaient tout seuls vers lui. Le pacte de non adhérence s'annonçait mis à mal. Heureusement, l'ultime secousse émotionnelle fut la colère. Il partit en me demandant de ne pas l'oublier.

Rester seule avec nos souvenirs en guise d'os à ronger tandis que tu seras auprès d'une autre, c'est tout ce que tu me souhaites ?

27 commentaires:

Anonyme a dit…

Bonsoir Marie-George...Tu est venue commenter une ou deux fois chez moi,je connais Zoridae, Monsieur Poireau, j'avais déjà lu ton pseudo...mais je ne susis pas sur d'être déjà venu ici...et là en voyant une visite venant de ton blog sur mon compteur de stat, je suis venu...et je viens de découvrir qui tu es, dans la vraie vie...souvenirs...

Marie-Georges a dit…

Bienvenue Romain ;)
En plus à cause de toi je me suis énervée trois fois, il y a peu.

Anonyme a dit…

Ça vous paraîtra peut-être dérisoire, mes petites précautions adultères, en regard de votre souvenir doux et triste, mais en ce qui me concerne, j'annonce toujours la couleur. Avant. (Et sa conclusion à lui semble un peu égoïste.)

Mais je ne jetterai pas la pierre à l'homme adultère (je suis derrière – surtout s'il est bi) : malgré son engagement ailleurs et ce qu'on peut qualifier de manipulation (volontaire ou pas), malgré son « pense à moi », crêve-cœur, il ne faut pas mettre en doute la vérité de son engagement, si imparfait soit-il, envers vous.

Christophe Sanchez a dit…

Un amour impossible. C'est bien dommage que les choses n'aient pas été dite plus tôt.

Marie-Georges a dit…

Comme une image,
Ce n'était pas une pierre jetée. D'abord j'adore cette chanson, et puis je ne porte pas de jugement moral sur l'adultère. Je sais juste qu'hélas, je ne peux me contenter d'une présence intermittente.
Kris,
C'est drôle mais ce n'est pas cela qui me chagrine. Si je l'avais su avant, rien ne se serait passé, parce qu'il m'intéressait tout entier ou pas du tout. Alors faut-il le déplorer je ne sais pas, j'ai au moins vécu une douce soirée dans cette illusion !

Audine a dit…

Je ne sais pas grand chose de toi, mais l'impression que tu me donnes, c'est de prendre les mêmes chemins amoureux que moi et c'est assez amusant.

Pour moi aussi, le problème de l'homme adultère n'est pas tant sa disponibilité, mais que son adultère ôte tout désir possible. Le type qui va prendre une douche tout de suite pour effacer ton odeur, celui qui regarde sa montre et qui ment comme un petit garçon au téléphone, tout ça, c'est tellement pitoyable ...
(Sans parler que ça fait beaucoup moins d'effets, une main qui caresse quand on sait qu'elle caresse ailleurs).

C'est vrai qu'il est à la fois drôle et triste, ton texte !

Marie-Georges a dit…

Audine,
Oui, c'est tout à fait ça ;)

Anonyme a dit…

@oui c'est comme ça que je suis venu sur ton blog...mais déçu, pas d'allusion rigolote à notre connaissance,où la bouche a un role dans le link...a bientot

Marie-Georges a dit…

Romain,
Marie-Georges ne raconte pas tout.
Mais, indirectement et anonymement certes, tu figures dans mon "historique buccal", regarde bien ; tu te souviens auprès de qui se sont renseignés les militants syndicaux, et qui m'a rapporté cette histoire, mmh ?

Le_M_Poireau a dit…

C'est peut-être d'avoir goûté aux fruits qui nous donne l'envie d'y regoûter encore.
Il faudrait parfois ne rien faire pour ne rien regretter...
Cela dit son attitude à lui n'est pas très claire, il faut bien le reconnaître !
:-))

Anonyme a dit…

ah ce n'était pas moi qui avait rapporté la bouche syndicale (la phrase avait d'ailleurs visiblement été tronquée...) mais une bouche commune!

Dorham a dit…

Marie-Georges (et un peu à Audine aussi),

parfois, les hommes adultères n'en sont pas vraiment et parfois, ils quittent vraiment leur vie de l'instant pour en rejoindre une autre.

ça arrive

(un jour, pour ce texte qui me touche vraiment particulièrement, je te raconterai une histoire MG)...

Zoridae a dit…

Il est très émouvant ce texte où tu te dévoiles... Voilà, je suis émue.

Balmeyer a dit…

On conviendra d'un code : "très beau".

On dira que c'est des conneries, mais je crois qu'il y a, quand même, en dépit du bon sens, quelque chose d'uniquement "féminin" dans certaines écritures, un truc poignant, inquiétant, total. Comme là.

Bises, et pas lol.

Marie-Georges a dit…

monsieur Poireau,
Pas faux tout ça...
Romain,
Ah ? Ma mémoire me joue des tours alors.
Dorham,
Merci. Raconte, tu m'intrigues là !
Zoridae,
Ca me fait drôle parce que moi, d'avoir écrit ce texte, je me sens mieux ! Du coup j'ai pris de la distance.
Balmeyer,
Activation du code "très beau" ?! Merci !

Anonyme a dit…

je sais ce n'est pas facile, mais passe ton chemin marieGeaorge... ça sent toujours mauvais ce genre de plan. merci pour ta sincérité c'est touchant...

Anonyme a dit…

Ca va virer club "Meectic survivor" ici :))

Balmeyer a dit…

BritBrit : mort de rire !! Au fait, ASV ?

Le_M_Poireau a dit…

Mode "très beau" ON

Option : Oui

Mode "très beau" : Off

Marie-Georges a dit…

So dilettante,
J'entends bien, je sais bien... D'ailleurs c'est pour ça que depuis deux ans il n'y a rien. Sauf destabilisation ponctuelle pour cause de réapparition inattendue.
Britbrit,
Toi alors ! Mais c'est vrai remarque. Dieu merci je n'ai pas encore pondu d'article sur les bienfaits de Meetic (le site le plus ennuyeux au monde ! Pourraient au moins ajouter un scrabble en ligne !)
Balmeyer,
Vas-y, sors ton LOL ! (C'est quoi ASV ?)
monsieur poireau,
Euh ? Interrupteur ? Jour-nuit ?

Balmeyer a dit…

ASV : j’ai appris ça y’a pas longtemps. Ca veut dire « Age / Sexe / Ville », c’était un truc utilisé dans les chats.

Exemple 1:
> Kikoo !
> ASV ?
> 57, H, Lourdes. Je m’appelle Robert.
> Ok , thx, bye.

Exemple 2 :
>Kikoo !
>ASV ?
>19, F , Lourdes
>Salut, pt1 j’adore Lourdes c’est ma ville préférée, tu aimes les gâteaux au chocolat ?

Marie-Georges a dit…

Quelle horreur :)))
On peut répondre "Moins que ça, oui, plutôt campagne" alors ?

Balmeyer a dit…

Ben oui c'est horrible ! Surtout que la jeune fille en question du chat est probablement un gros barbu, en vérité !

Par contre, ta phrase, je l'ai pas comprise, mais j'imagine qu'il s'agit d'une ruse de sioux pour perdre les facheux dans la nature !

Marie-Georges a dit…

(C'était une façon de répondre comme une autre. Sexe ? oui. Ville ? plutôt campagne. etc.)
Tu crois qu'il y a beaucoup de vieux barbus qui se font passer pour des jeunes nonnes de Lourdes en goguette ? :)))
Merci pour cette instructive poilade, en tout cas, Balmeyer :)))

Audine a dit…

Tiens on devrait lancer une sorte de chaine, où de série à plusieurs, sur Meetic.
Ca serait rigolo non ?
non ?
ah bon.
:)

Marie-Georges a dit…

Audine,
Précise ton idée, ça m'intrigue ! Une chaîne comment ?

Anonyme a dit…

décidément le passé est une mauvaise herbe tenace, une sang sue qui souvent lasse, il fallut que je lise ce bien étrange texte, aux accents chantants et champêtres, au timbre caressant et pourtant une fois de plus mordant à la fin laissant un petit bout d'amertume comme une histoire sans lendemain