Giotto, Le baiser de Judas, 1306
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Mon plafond est incrusté de quelques vasistas. Je veux parler de ces fenêtres d'époque et de toit, nées avec le reste de l'immeuble dans les années 70 du siècle dix-neuvième après l'invention du Judas.
En ce temps-là, c'était compliqué. Pour poser un vasistas, il fallait forcément fabriquer un châssis en bois dépassant du zinc comme une petite cheminée puis le surmonter dudit vasistas, lui-même équipé d'un cadre métallique presque droit et prétendant pourtant à quelque étanchéité, sans oublier un système de poulie-ficelle pour espérer être ouvert par nous, pauvres habitants aux bras levés cherchant l'air trois mètres plus bas.
Le futur monsieur Velux, qui durant l'enfance scrutait les hauteurs architecturales depuis la chambre de bonne familiale, rêvait de toits lisses, de lumière et d'espace. Mais surtout de toits lisses. A l'aide du dos de la cuillère, il aplanissait son assiette de purée après y avoir creusé de nombreux puits. Il aimait l'aspect de la plâtrée parmentière ainsi égalisée ; il aurait voulu que toutes les maisons fussent pareillement coiffées. Plus tard, il inventa la fenêtre que vous connaissez.
Comme vous le savez, du fond de mon lit je vois les vitres archaïques claquer au vent et trembler en échappant d'étranges rires démoniaques, afin peut-être de couvrir le couinement ridicule de leurs châssis grippés. Si j'étais un revenant, il est probable que je retournerais aussi à mon ancienne adresse pour me venger de ces saletés de fenêtres qui ne s'ouvrent jamais comme on veut.
N'empêche, j'aime mes vasistas rouillés aux vitres piquetées par plus de cent ans d'intempéries parisiennes. Mais la pression sociale est trop forte. Je dois m'en séparer. Il me faut couper court à toute conversation de visiteur qui commence par "c'est mal isolé ici/ tu vas payer cher en chauffage/ la chaleur monte mais pas toi", etc. Je proteste vivement lorsqu'on me suggère de refaire le parquet afin d'enfin marcher droit. J'invoque le charme (de l'ancien) et le travail (du bois). Mais contre l'argument éco-nomico-logique de gaspillage d'énergie je ne peux rien.
L'âme en peine, je me résous à prendre congé de mes antiques vasistas. Quand j'étais petite, à l'aide des dents de ma fourchette, je traçais des sillons dans la purée. Ces irrégularités surmontant l'assiettée me réjouissaient. Mais là, monsieur Velux a gagné.
Le devis a changé ma vie. Envolée par les fenêtres, ma nostalgie. Monsieur Velux m'a envoyé un de ses spécialistes. L'oeil de velours et le muscle saillant, ce dernier m'a annoncé d'une voix chaude que si je tenais absolument à avoir un système de poulie-ficelle, c'était possible. "Je vous offre le cordon", a-t-il ajouté en plongeant un regard félin dans mes orbites hagardes. Ses pectoraux paraissaient vouloir s'échapper du T-shirt par tous les moyens, s'insinuant à travers manches, col et mailles. Ses dents, largement découvertes par un sourire conquérant, semblaient faites pour tracer des sillons dans une purée ou sur toute autre surface tendre. Vivement qu'il revienne.
20 commentaires:
Et avez-vous planifié le remplacement prochain de votre lave-linge. Ces messieurs de Darty sont très ... (quel est le mot déjà ? ah oui) compétents aussi, paraît-il.
Méfiez-vous toutefois, le coup de bambou pourrait se limiter à l'addition.
Je vois que tes hormones te taquinent encore ! Pourtant, à Paris c'est déjà l'automne !
(Aurais-tu un faible pour les hommes ayant des métiers manuels ?)
Comme une image,
Ne m'en parlez pas. Les livreurs Darty ont défilé ces derniers temps et si j'avais eu ma connexion, j'aurais publié un article sur celui qui m'a mis le feu (des plaques à induction).
Merci pour cette mise en garde. J'ai bien conscience de l'aspect commercial de ce gringue, mais on peut rêver...
Zoridae,
Tu crois que l'automne calme les choses ? (Je suis sciée, tu me cloues le bec : tu as vu juste !)
Monsieur Velux, c'est pas celui qui apparaissait dans le manège en chantier ?
Philtre,
Ah tu crois ? Je me souviens surtout de Zéboulon ;)
J'ai toujours aimé les velux, j'en avais un autrefois, ma nouvelle maison n'en a pas.
J'aimais y apercevoir la lune lorsque je faisais pipi la nuit, oui, parce que ce fameux vélux se trouvait dans ma salle de bain...
Jolie découverte que ton blog.
Lidia,
Tiens, moi aussi j'en ai un pour regarder la lune lorsque je me savonne. Merci et bienvenue :)
vive les vasistas rock'n roll !
Gaël,
C'est un groupe de rock ?
non une chanson de Thiefaine
Ah ! Voilà qui manquait à ma culture, merci Gaël !
On ne doit pas dire Velux mais "fenêtre de toit" !
Voilà que je fais mon Didier Goux, maintenant !
Bin dis-donc, il fait chaud chez toi ! Il faut que je pense à me laisser pousser des pectoraux...
:-))
Si ca se passe mal avec monsieur pectoral, tu sais que tu peux t'occuper en regardant le ciel, au moins !
Et ce salaud ne t'offre qu'une cordelette ? Qu'il se désape et plus vite que ça !
Le devis est accepté certes, mais par soucis 'éco-nomico-logique' ou une raison plus...charnelle aurait précipité ta décision...
Au fait, tu es taguée! :-)
Monsieur Poireau,
Certes.
Un poireau qui fait pousser des pectoraux, la biodiversité m'épatera toujours (je reviens du jardin des plantes) !
Cynique-ta-mère,
:)))) Pratique ! Il ne me restera plus qu'à me positionner en fonction du Velux.
Britbrit,
Je suis d'accord !
Mademoiselle Ciguë,
Diable ! J'arrive.
@Marie-Georges : purééée, il revient quand le chipendale ?
@monsieur poireau : on dit pas plutôt "poilux" ? comme en 14 ?
@BritBrit : t'imagines ? si c'était la ficelle de son striiiing !!
Moi aussi j'aime assez quand les z'hommes ils sont assez velux.
Et plus sérieusement, je suis fan absolue de ton personnage de femme souvent errante dans des considérations d'espace proche assez oiseuses, et surtout, égarée par une libido aussi affolée qu'un phalène autour d'un hallogène.
C'est toujours acide, détaché, et aussi très quotidien.
J'adore.
Tante May,
Je ne sais pas, j'attends, les yeux dans ma purée...
Audine,
:)))
Audine,
Merci !
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